Un été italien, par Quelques complices sans patrie
janvier 2005, 32 pages

opération “cervantes”, 27 juillet

Communiqué de David Santini

Chers compagnon/nes,

Tout d'abord, un bref résumé des événements qui ont mené à mon arrestation et à celle des autres compagnons anarchistes. Nous sommes accusés, avec je ne sais combien d'autres compagnons, de faire partie d'une fantomatique association subversive. Après plus de vingt jours de prison à présent, j'ai décidé d'écrire ce que j'en pense. L'accusation spécifique à mon encontre est d'avoir placé avec un autre compagnon, lui aussi incarcéré, un engin explosif devant le tribunal de Viterbo.

Les accusations sembleraient prouvées par des écoutes "d'ambiance" [micros placés dans les maisons]. En réalité, ceux qui ont eu l'occasion de lire le décret de mise en détention préventive n'ont pu se retenir de sourire à la vue des blagues, des mystifications et des mensonges qu'il contient. Mise à part l'évidente bêtise dont font preuve les accusateurs, notamment le fait que je sois doté du don d'ubiquité [Tittarello se serait trouvé en deux endroits au même moment], je revendique ma solidarité avec tous ceux qui luttent le cœur empli du désir d'une société vraiment libre.

J'annonce avec ce texte que j'ai interrompu la grève de la faim après seize jours, parce que les analyses de sang mettaient en évidence la possibilité d'un éventuel blocage rénal qui aurait eu pour conséquence de me faire rester sous dialyse jusqu'à la fin de mes jours. Pour en revenir aux conjectures à notre propos, j'accuse la Digos de Rome et Viterbo d'acharnement manifeste à notre encontre. Je dénonce l'incompétence et les sales manigances de la Digos de Viterbo contre moi, qui va jusqu'à inventer des bribes d'écoutes d' "ambiance" qui n'ont jamais eu lieu. J'accuse les responsables de cette énième conjuration contre le mouvement anarchiste de vantardise, pour vouloir à tout prix faire entrer des individus libres dans le cadre d'une association subversive inexistante.

D'autre part, comme on le sait depuis plus de sept ans (1), et après les innombrables perquisitions qui n'ont rien donné, après avoir retrouvé tant de fois des micros à l'intérieur des maisons et des voitures, après des heures d'écoutes et de filatures contre les compagnons de Viterbo qui n'ont jamais donné lieu à aucune accusation, ces génies de l'investigation ont dû faire appel à leur fantaisie. Ils ne pouvaient pas continuer ainsi à faire figure d'incapables. Vu que la technologie n'avait servi à rien, l'esprit de ces Sherlock Holmes à deux sous s'est mis au travail. Ils ont alors jeté les bases de cette énième association subversive inexistante. Non contents de cela, des bouts d'écoutes ont été falsifiés pour finalement leur permettre d’arrêter quelques anarchistes qui perturbaient depuis trop longtemps leurs tristes vies.

Pour ma part, je reste indifférent à leurs accusations. Je conti-nuerai de lutter avec mes compagnons au côté des exploités, au côté de ceux qui meurent au travail pour remplir les poches de quelques exploiteurs, au côté de ceux qui revendiquent le droit à une maison, au côté de ceux qui, obligés de fuir leur pays d'origine, doivent ensuite se confronter à la cruelle réalité de la répression et du racisme. Je continuerai de lutter au côté de ceux qui, revendiquant un monde libéré de ces atrocités, sont réprimés et incarcérés. Je ne ferai pas comme plus d'un me l'a conseillé ces derniers jours, trouvant ma lutte juste mais inutile parce que le pouvoir que j'affronte est tellement fort que je serai écrasé. Alors quoi, je devrais être lâche et me mettre en retrait avec ma bonne conscience d'une lutte juste, et laissant d'autres lutter à ma place ? Je trouve cela d'une lâcheté dé-primante. Conscient de cela, j'en profite pour saluer et embrasser toutes les personnes qui ont le même désir au cœur.

LE FUTUR EST A NOUS

Tittarello,
prisonnier dans la prison
des Vallette (Turin)

 

[Traduit d’anarcotico.net du 27 août 2004]

(1) Référence à l'enquête Marini initiée en 1996 pour association subversive qui s'est conclue par l'acquittement de 44 anarchistes en avril 2004, et une dizaine de condamnations pour des délits spécifiques.