" Dans le marécage, limites et perspectives de la répression anti-anarchiste"
éd. La conjuration des Ego, juin 2000, 50 pages

Projecteurs de la Justice et anonymat de la révolte

POURQUOI L'Etat italien réprime aujourd'hui des anarchistes ? Question banale. pourrait-on dire. Parce qu'ils sont anarchistes, ennemis déclarés de toute autorité. Et pourtant, est-ce que les anarchistes sont vraiment un problème aujourd'hui ? Est-ce qu'il suffit de se réclamer de Durruti ou d'Émile Henry pour être dangereux ?

La démocratie déclare ouvertement que tout un chacun est libre d'exprimer toutes les opinions qu'il veut, y compris les plus radicales. L'important, c'est qu'elles restent des opinions, c'est-à-dire des idées qui, séparées de celui qui les exprime et de leur pratique, peuvent circuler comme marchandises. Alors, on peut se réunir pour parler d'autogestion, de fédéralisme ou d'un film à succès sur la révolution espagnole. On a le droit de parler d'anarchie. Le pouvoir l'a enfin reconnu. D'ailleurs, la révolte on peut toujours la contempler de l'autre bout de la planète, ou sous la poussière de l'histoire. On peut jurer sur Ascaso et Facerias tout en criant au scandale quand quelqu'un décide d'attaquer la propriété des riches ou de s'en prendre à quelques structures du profit et de la domination.

Pourquoi donc 1'Etat italien réprime aujourd'hui des anarchistes ? Sûrement pas pour ce qu'ils sont déjà, car ils ne sont pas grand chose, mais pour ce qu'ils représentent dans ce minuit du siècle : un incendie toujours possible. Les idées d'autonomie individuelle et de classe, d'auto-organisation, de révolte généralisée, d'insurrection sont des détonateurs potentiels, mais elles ont besoin, comme tous les détonateurs, du matériel explosif qui est fourni par la situation sociale. Or, la société apparaît aujourd'hui plutôt pacifiée, mais les maîtres de l'obéissance et de la résignation savent que les comptes - contrairement à ce que prétendent leurs fables déterministes sur la fin de l'histoire - sont loin d'être faits. Pour le moment, dans un contexte d'apathie marchande et de soumission démocratique au pouvoir, ceux qui continuent opiniâtrement à soutenir la nécessité d'un bouleversement social deviennent visibles aux yeux de la répression. Et visibles se font également les gestes d'insatisfaction, les actes de rébellion contre le travail, l'école ou le chômage, les attaques anonymes et diffuses contre les appareils du contrôle et de la domestication. Pour tout ce qui échappe à la glaciation sociale, le regard de l'Etat est attentif
Aujourd'hui, le mot révolution n'est pas à la mode. L'idéologie démocratique pénètre partout. Il faut participer à la dépossession générale des individus. Le pouvoir aime les assemblées, se fait du souci pour l'environnement et n'est pas sourd aux discours sur les garanties sociales et la démocratisation des institutions. Toute tractation est possible. Avec un contrôle social et technologique adéquat, on peut demander aux citoyens leur avis sur tout. Les décisions sont prises ailleurs. Avec la force de représentation nécessaire, il y a toujours moyen de s'asseoir aux tables de négociations. Les gouvernants appellent au dialogue. Pour celui qui refuse de répondre, le fichage policier commence.

Pour ceux qui arrachent leurs espaces avec l'action directe, qui font de l'autogestion une pratique de vie, l'alternative est claire : soit la légalisation, soit les flics. Pour les partisans d'une révolution sociale qui n'ont pas des droits à revendiquer, mais tout à prendre, la répression est garantie par la droite ainsi que par la gauche et sa gauche. Pour les prolétaires enragés susceptibles de mettre à profit leur meilleure tradition ---- celle du sabotage -- , il y a les mensonges médiatiques visant à les séparer de tout projet révolutionnaire.

C'est dans ce cadre - diffusion des idées subversives, squats qui refusent d'être légalisés, attaques contre les structures de l'Etat et du capital, et idées pour les défendre - qu'il faut placer les procès et les arrestations à l'encontre de plusieurs dizaines d'anarchistes en Italie. Le reste - invention de « bandes armées », preuves et "repentis" créés de toute pièce, criminalisation médiatique, suicides d'Etat, etc. --- n'est que la conséquence pratique. Mais procédons par ordre.

Marini et alentours

En novembre 1995, 70 personnes sont inculpées de « bande armée » et d'« association subversive à but terroriste », parce qu'accusées de faire partie d'une organisation - la prétendue et future « O.R.A.I. », Organizzazione Rivoluzionaria Anarchica Insurrezionalista, - qui n'a jamais existé. Les médias prêtent leurs services à cette enquête menée par le juge Marini, en parlant d'une bande clandestine et hiérarchisée, liée, sous couvert d'anarchie, à la criminalité organisée. Tout de suite, des initiatives de solidarité sont organisées un peu partout : des collages, des meetings sur les places publiques, des soirées de soutien, des débats, la publication d'un dossier à vingt-cinq mille exemplaires et l'occupation des locaux d'un quotidien national. Des actions d'éclat sont menées par des squatters. Deux attaques à l'explosif, revendiquées par des anarchistes comme cadeaux à Marini et à un autre juge, ont lieu contre des structures militaires.

En septembre 1996, des mandats d'arrestation sont lancés à l'encontre de 29 anarchistes (en partie emprisonnés, en partie déjà incarcérés pour d'autres raisons, en partie en clandestinité). Même les maisons des autres inculpés sont perquisitionnées avec un remarquable déploiement de flics. Marini souligne qu'il ne s'attaque pas aux idées anarchistes, mais uniquement aux anarchistes méchants. On est tout de même en démocratie. Contre la plupart des accusés il n'y a que des « délits associatifs », tandis que pour quelques-uns les inculpations sont plus spécifiques. Au cours des audiences préliminaires, l'accusation de « constitution, organisation et participation à bande armée » tombe pour certains, mais restent celle d'« association subversive » et d'« association subversive à but terroriste » . Quelques-uns sont tout de suite acquittés. En décembre 1996, le consulat de Malaga, en Espagne, est occupé par des révolutionnaires armés qui séquestrent le consul et son fils en leur faisant enregistrer un message de solidarité avec libertaires italiens et à tous les prisonniers (1). Le procès Marini commence le 20 octobre 1997 à Rome (et il est encore en cours, le premier degré de la procédure n'étant même pas conclu). Ce même jour, à Athènes, un siège de la compagnie aérienne Alitalia est attaqué à l'explosif en solidarité avec les anarchistes italiens : la signature dit « lutte internationale révolutionnaire » . La solidarité internationale ne manque pas (en France, en Allemagne, aux Etats-Unis, en Hollande, en Grèce, en Argentine, en Espagne). Suite à un vice de forme, quelques mois après tous les compagnons sont enfin relâchés (sauf ceux qui sont déjà emprisonnés pour d'autres motifs) ; ils sont maintenant en liberté provisoire. Une compagne, après quelques mois de prison à Amsterdam, sera extradée et ensuite assignée à résidence. Un autre anarchiste, incarcéré plusieurs mois à Paris, est actuellement sous contrôle judiciaire dans cette même ville. Par contre, six autres personnes - y compris les parents de quelques compagnons - sont poursuivies en tant que « complices » .

Comme c'est souvent le cas pour des procès de cette ampleur, l'enquête du juge Marini ne fait que reprendre et développer des enquêtes plus anciennes. Elle réunit des accusations isolées pour créer des inculpations collectives et en finir ainsi avec le plus grand nombre d'anarchistes possible. L'invention d'une « bande armée » sert justement à ce but. Aujourd'hui on peut dire, grâce à la découverte d'une note de service interne des carabiniers, que le R.O.S. (Regroupement Opérationnel Spécial) est le véritable architecte de l'enquête. Le R.O.S. est une création du général Dalla Chiesa, le generalissimo qui faisait mitrailler les brigadistes, torturait les révolutionnaires et gérait ceux qui collaboraient avec la Justice (les « repentis », comme les définit un langage à la fois juridique et religieux). Le document des carabiniers est paru à un moment où le R.O.S. était au centre d'un scandale médiatique, avec l'un de ses chefs incarcéré sous l'inculpation d'avoir organisé dans une caserne le raffinage de cocaïne pour acheter des « repentis » . Dans leur document, les carabiniers expliquent que quinze ans d'enquêtes et de procès contre les « anarchistes insurrectionnalistes » n'ont rien donné ; en dépit des condamnations à l'encontre de quelques-uns d'entre eux pour des faits précis, la diffusion de leurs idées subversives continue. Voilà donc la nécessité de créer une « Organisation » fantôme en utilisant les « révélations » mal construites d'une jeune fille reconnue - citons les carabiniers - comme « élément faible et psychiquement malléable » : l'irremplaçable « repentie ».

Le juge Marini, véritable croisé de l'« anti-terrorisme » en Italie, s'occupe du reste. Il fait déclarer à la « repentie » - que personne ne connaît et qui n'a jamais participé aux initiatives du mouvement - avoir organisé un hold-up avec des anarchistes, pour la présenter ensuite comme l'un des membres de l'« O.R.A.I » . Ce nom, le juge le tire du titre d'un article paru dans un journal anarchiste, article dont le texte a été utilisé comme base pour des conférences tenues en Grèce. Or, a-t-on jamais vu quelqu'un exposer le programme d'une organisation clandestine durant des conférences dans une université ? Mais il ne s'agit que de détails par rapport à toutes les contradictions de l'enquête (il suffit de dire que plusieurs compagnons sont accusés d'avoir constitué cette prétendue « bande » à l'âge de douze ou treize ans...). A partir de cette construction maladroite de Marini, des actions pour lesquelles des anarchistes sont déjà en prison (braquages, attaques contre les appareils nucléaires, un enlèvement collé sur le dos des compagnons par les flics) sont liées à d'autres affaires non résolues, et tout cela à une organisation militaire structurée sur un double niveau : le premier niveau, public (représenté par les journaux, les squats, les débats, les manifestations de solidarité, etc.), le deuxième niveau, clandestin (représenté par les hold-up, les attentats, les enlèvements, etc.). On ajoute un chef et un organigramme et c'est fait : on a une « bande armée » . Ceux qui publient des journaux en sont les théoriciens, ceux qui sont en prison les soldats, ceux qui vivent dans les squats les complices. L'Etat se regarde dans le miroir et il y trouve ses ennemis. Mais ce qui effraie le pouvoir, ce ne sont pas seulement les idées révolutionnaires, mais aussi toutes les actions directes placées « dans le marécage de l'anonymat politique », comme disent les carabiniers.

Pour en rester à l'enquête, pendant les dix dernières années en Italie, ont été détruits ou endommagés plus de dix mille pylônes électriques, et rien que les grands magasins « Standa » appartenant à Berlusconi ont subi, sous sa présidence, plusieurs milliards de lires de dégâts, suite à des sabotages dont une infime partie seulement a été revendiquée par des anarchistes. Le problème de l'Etat est évident. S'il n'arrive pas à identifier les responsables matériels de ces attaques, néanmoins il lui est extrêmement facile de savoir qui les soutient ouvertement. Dans l'impossibilité d'arrêter l'Action, il ne lui reste qu'à essayer d'immobiliser l'Idée. Ainsi, il veut attribuer à une supposée organisation militaire ces gestes de révolte qui, de par la simplicité des moyens employés, peuvent être réalisés par tout un chacun. De plus, contrairement aux procès habituels pour apologie du crime, instigation à la violence, occupation illégale, etc., une inculpation pour « bande armée » permet de distribuer des années et des années de prison d'un seul coup.

Soleils, éclairs et vautours

À partir de 1996, dans le Val de Susa au Piémont, des dizaines de sabotages sont réalisés contre la construction d'une ligne de trains à haute vitesse (TAV, l'équivalent du TGV). La plupart de ces actes de rébellion sont anonymes, tandis qu'un ou deux sont revendiqués par les « Loups gris », un groupe jusque-là inconnu. La population est dès le début plutôt enragée contre ce projet de pollution et de bétonnage représenté par le TAV. Les partis de gauche et les écologistes d'Etat risquent de ne pas suffire pour assurer la paix sociale. Une opération tant médiatique que judiciaire construit alors l'image de l'« écolo-terroriste » : les sabotages seraient l'œuvre d'une « bande armée » d'anarchistes. Ainsi, trois compagnons, qui vivent dans un squat de Turin, sont arrêtés en mars 1998 sous l'inculpation d'être les « Loups gris » pour être ensuite qualifiés de complices et enfin d'imitateurs de ce groupe ; bref il n'y a rien contre eux par rapport aux sabotages. Ils sont réprimés parce qu'ils soutiennent ouvertement la nécessité d'une lutte autonome et directe contre les nuisances sociales et de l'environnement ; ils sont réprimés pour empêcher la possibilité d'une révolte diffuse au Val de Susa.

Le 28 mars 1998, Edoardo Massari, dit Baleno (« Éclair »), est trouvé pendu dans sa cellule de la prison turinoise « Le Vallette » . Pendant un mois, la rage de ses amis et compagnons explose dans des affrontements avec les flics, dans des occupations, dans un grand cortège qui s'attaque au palais de Justice et dans quelques sabotages. Les médias parlent des squatters pendant des semaines, en cachant ce qui les gêne vraiment : la lutte sans médiation contre le TAV. Le gouvernement appelle au dialogue. Les vautours de la politique descendent sur le cadavre d'Edoardo. Les philosophes et les sociologues ne manquent pas de vendre leurs irremplaçables opinions. L'aspect le plus radical du mouvement est sans doute le refus des médias. Lors de l'enterrement de Baleno, le journaliste et indicateur Daniele Genco, connu pour avoir déjà calomnié Edoardo par le passé, se fait tabasser. Ce geste généreux et lucide, revendiqué par tout le mouvement, est l'occasion pour trois autres mandats d'arrêt. Un compagnon passe quelque temps en prison avant d'être relâché, tandis que les deux autres sont toujours recherchés (2). En Grèce, un magasin Benetton est incendié avec une dédicace à Baleno.

Au mois de juillet, Maria Soledad Rosas, Sole (« Soleil »), se « suicide » dans la communauté où elle est assignée à résidence. Sole, anarchiste argentine et compagne d'Edoardo, avait été incarcérée bien qu'elle ne fusse même pas en Italie à l'époque des attaques contre le TAV. Sa mort provoque la rhétorique des tous les politicards et la colère des âmes ardentes, comme dirait Cœurderoy. Une barricade est érigée et incendiée dans le centre de Turin, des églises sont endommagées, des locaux de journaux sont remplis de merde, etc. En Grèce, de nombreux sabotages ont lieu contre des intérêts italiens. Fin juillet, des colis piégés - qui n'explosent pas - sont envoyés à plusieurs représentants des institutions ; le juge Laudi (responsable de l'arrestation de trois anarchistes et de l'enquête sur les sabotages au Val de Susa) ; le journaliste Genco (ordure dont on a déjà parlé) ; le conseiller régional des Verts Cavaliere (ayant visité les trois compagnons en prison, soutenant la thèse de l'implication des services secrets dans les sabotages contre le TAV et se présentant comme médiateur entre les institutions et les squatters) ; un député de Rifondazione Comunista, Pisapia (ex-gauchiste, président de la commission justice de l'Assemblée Nationale) ; un conseiller municipal de Rifondazione, Umberto Gay (médiateur entre la mairie de Milan et le centre social Leoncavallo, un des responsables de la remise à la police de la cassette vidéo qui a conduit à l'incarcération de l'anarchiste Patrizia Cadeddu) ; le directeur du service sanitaire de la prison « Le Vallette » (responsable de la mise à l'isolement de Soledad). À la même période, un transformateur électrique d'un chantier du TAV est saboté près de Turin.

Les colis piégés font la une des journaux. Ils sont attribués dans un premier temps aux squatters, avant. qu'il ne soit décidé d'ouvrir la chasse aux « anarchistes insurreçtionnalistes » . Le climat est tendu. Nombreux sont les centres sociaux et les squats qui prennent leurs distances (les colis piégés seraient, selon eux, l'oeuvre des services secrets ou un grand spectacle dont les squatters sont les victimes). Marini ne perd pas l'occasion de se faire interviewer par la presse : les auteurs des colis piégés, dit le juge ineffable, sont sans doute quelques-uns des ses inculpés ; ils sont tous une « bande », et cela suffit.

Du 11 au 14 septembre, un camping contre le TAV se déroule au Val de Susa. À l'initiative, qui prévoit surtout des meetings dans des squares, participent de nombreux camarades d'Italie et d'Europe. Silvano Pelissero, le troisième des anarchistes incarcérés pour l'opposition au TAV, est depuis quelques mois aux arrestations domiciliaires. Le procès contre lui commencera le 14 décembre prochain (3).

Extrait du journal Le loup-garou n°2, novembre 1998 (disponible à Sans Patrie - c/o TCP - 21ter rue Voltaire - 75011 Paris)

(1) Pour cette action, trois anarchistes italiens - Claudia Lavazza, Giovanni Barcia et Michele Pontolillo - ont été condamnés à 11 ans de prison. Déjà détenus pour un braquage à Cordoue (décembre 97), ils se sont vu coller sur le dos l'attaque du consulat sur la base du seul témoignage du consul. Les véritables auteurs de l'action, dans des communiqués signés Corazones libres (« Cœurs libres »), ont démontré que les compagnons incarcérés n'avaient rien à voir. Giovanni et Michele figurent également parmi les accusés du procès mené par Marini.
(2) Le 20 mars 2000, Luca Bertola a été condamné à 3 ans et 2 mois de prison fermes, Arturo Fazio, toujours recherché, à 3 ans et 6 mois. Quant à Andrea Macchieraldo, il a été acquitté.
(3) Le 31 janvier 2000, Silvano Pelissero a été condamné à 6 ans et 10 mois de prison fermes. Edoardo et Soledad ont été acquittés post-mortem, ce qui fait que Silvano a été condamné pour association subversive »... tout seul.

Si une vidéo ne suffit pas

Le 25 avril 1997 - jour des élections municipales et anniversaire de la dite Libération - une bombe explose contre la mairie de Milan. La revendication, signée « Azione Rivoluzionaria Anarchica », contient un message de solidarité avec tous les libertaires incarcérés, un appel à l'abstention et un discours contre la République fondée sur l'exploitation, négation des tensions subversives présentes dans la lutte contre le fascisme. La revendication est laissée dans la boîte aux lettres de Radio Popolare. Une caméra de vidéo-surveillance filme la silhouette qui l'apporte. Sur la base de cette vidéo, remise à la police par les gauchistes de Radio Popolare, l'anarchiste Patrizia Cadeddu est arrêtée et, le 8 juin 1998, condamnée à 5 ans de prison et à une amende de 229 millions de lires pour les dégâts. En appel, courant 1999, les juges ont changé la peine en 3 ans et 4 mois de prison. Si la vidéo est totalement inutilisable, même selon les journalistes, Patrizia est très connue pour sa participation au Laboratorio anarchico, espace autogéré milanais. Et cela suffit.

La moulinette de l' « association subversive »

L'arme des délits associatifs a été à nouveau utilisée par l'Etat italien à trois reprises. Suite à l'exécution, en mai 1999, du bureaucrate Dantona par les nouvelles Brigades Rouges - Parti Communiste Combattant, la magistrature a accusé les C.A.R.C. (Comités d'Appui à la Résistance Communiste), qui sont des collectifs publics, d'être un groupe de soutien logistique aux B.R. Une cinquantaine de personnes ont été inculpées d'« association subversive », dont une partie sont encore recherchées. Comme riposte aux nombreuses actions directes réalisées pendant la guerre au Kosovo contre les intérêts militaires et contre les sièges du parti de gauche à l'époque au pouvoir, des anarchistes de Bologne ont été incarcérés en juin 1999 (puis relâchés) sous l'inculpation d'« association subversive » : l'instruction est toujours en cours. Encore par rapport à des actions contre la base militaire de l'OTAN à Aviano, une vingtaine de personnes (parmi lesquelles on trouve aussi bien des marxistes-léninistes que des communistes libertaires) ont été accusées en décembre 1999 d'« association subversive à but terroriste » pour leur prétendue appartenance aux « Groupes de Partisans pour le Sabotage », qui auraient revendiqué une attaque contre une entreprise liée à la base. Le procès est toujours en cours.